mercredi 20 mars 2019

A.K. Emmerick : L'Eglise, le «petit homme» et la «courtisane»


Anna Katharina Emmerick, née le 8 septembre 1774 à Coesfeld et décédée le 9 février 1824 à Dülmen, est une religieuse catholique allemande, appartenant à l'ordre des augustines et une mystique. Bienheureuse, elle a été béatifiée par le pape Jean-Paul II, le 3 octobre 2004.



Elle est l'une des rares mystiques à laquelle Guénon accorde de la crédibilité et un "apport" conforme à la Tradition tout en déplorant l'absence de la Connaissance véritable, propre aux initiés. Elle a perçu indirectement "certaines réalités d'ordre supérieur, non pas telles qu’elles sont en elles-mêmes, mais traduites symboliquement et revêtues de formes psychiques ou mentales."
Et comme tous les mystiques, elle reste cantonnée à l’exotérisme et à la forme religieuse à laquelle elle appartenait.

Ce résumé concernant certains points spécifiques des visions d’A.C. Emmerich a été fait en regroupant plusieurs sources, textes et livres.



La doctrine de l’Eglise est pervertie

«Ils bâtissaient une grande église étrange et extravagante ; tout le monde devait y entrer pour s'y unir et y posséder les mêmes droits ; évangéliques, catholiques, sectes de toute espèce : ce devait être une vraie communion des profanes où il n'y aurait qu'un pasteur et un troupeau.
Il devait aussi y avoir un Pape (élu, vraisemblablement !) mais qui ne posséderait rien et serait salarié.
Tout était préparé d'avance et bien des choses étaient déjà faites ; mais à l'endroit de l'autel, il n'y avait que désolation et abomination. »

« Je vis bien souvent Jésus lui-même cruellement immolé sur l'autel par la célébration indigne et criminelle des Saints Mystères. Je vis devant des prêtres sacrilèges, la sainte hostie reposer sur l'autel comme un enfant Jésus vivant qu'ils coupaient en morceaux avec la patène et qu'ils martyrisaient horriblement. Leur messe, quoique accomplissant réellement le Saint Sacrifice, m'apparaissait comme un horrible assassinat»
« Je vois chez tous, même chez les meilleurs d'entre eux, un orgueil effrayant, mais chez aucun l'humilité, la simplicité et l'obéissance. Ils sont terriblement vains de la séparation dans laquelle ils vivent. Ils parlent de foi, de lumière, de christianisme vivant ; mais ils méprisent et outragent la sainte Église dans laquelle seule il faut chercher la lumière et la vie. »


« C'est quelque chose de très grand, mais aussi quelque chose d'impossible sans la vraie lumière, sans la simplicité et la pureté, que de vivre selon la foi de cette sainte Église »

« Ils se placent au-dessus de tout pouvoir et de toute hiérarchie ecclésiastique et ne connaissent ni la soumission ni le respect envers l'autorité spirituelle. Dans leur présomption, ils prétendent mieux comprendre toutes choses que les chefs de l'Église et même que les saints docteurs. Ils rejettent les bonnes œuvres et veulent pourtant posséder toute perfection, eux qui, avec leur prétendue lumière, ne jugent nécessaires ni obéissance, ni règles de discipline, ni mortification, ni pénitence.  Je les vois toujours s'éloigner de plus en plus de l'Église, et je vois beaucoup de mal provenir d'eux.
Aucun égarement n'amène des conséquences aussi désastreuses et n'est aussi difficile à guérir que cet orgueil de l'esprit par suite duquel l'homme pécheur prétend arriver à la suprême union avec Dieu sans passer par le chemin laborieux de la pénitence, sans pratiquer même les premières et les plus nécessaires des vertus chrétiennes et sans autre guide que le sentiment intime et la lumière qui est censée donner à l'âme la certitude infaillible que le Christ opère en elle. »

« Ces lumières ne sont rien ; mais la grâce accordée aux fidèles enfants de l'Eglise est grande. Ceux-là seuls, par leur confession sincère et obéissante de la foi catholique, la seule vraie ; par leur communion vivante avec l'Eglise visible, sont dans les eaux qui découlent de la Jérusalem céleste. Quant à ceux qui ont la présomption de s'élever au-dessus de l'Eglise et de l'autorité spirituelle, qui prétendent être les seuls à posséder la lumière et s'appellent eux-mêmes» la communion des saints, « ils n'ont aucune lumière réelle, car ils ne se tiennent pas dans la foi, mais ils s'égarent et se séparent de Dieu et de son Eglise. 

Je vis, avec leurs terribles conséquences, les mesures que les propagateurs des lumières prenaient, partout où ils arrivaient au pouvoir et à l’influence, pour abolir le culte divin ainsi que toutes les pratiques et les exercices de piété, ou pour en faire quelque chose d’aussi vain que l’étaient les grands mots de "lumière", de "charité", "d’esprit", sous lesquels ils cherchaient à cacher à eux-mêmes et aux autres le vide désolant de leurs entreprises ou Dieu n’était pour rien.
Ces «éclairés» je les vois toujours dans un certain rapport avec la venue de l'Antéchrist, car eux aussi, par leurs menées, coopèrent l'accomplissement du mystère d'iniquité».


« On gardait le silence sur la Croix, sur le sacrifice et la satisfaction, sur le mérite et le péché, ou les faits, les miracles et les mystères de l’histoire de notre rédemption devaient céder la place à de creuses ‘’théories de la révélation’’, où l’homme Dieu, pour être supporté, ne devait plus être présenté que comme ‘’l’ami des hommes, des enfants et des pécheurs’’ où sa vie n’avait de valeur que comme ‘’enseignement’’, sa Passion comme ‘’exemple de vertu’’, sa mort comme ‘’charité’’ sans objet ; où l’on enlevait au peuple croyant l’ancien catéchisme qu’on remplaçait par des ‘’histoires bibliques’’, où le manque total de doctrine devait être voilé sous un langage naïf à la portée de toutes les intelligence ; où les fidèles étaient forcés d’échanger leurs livres de piété, leur vieilles formules de prière et leurs anciens cantiques contre des productions de fabrique moderne aussi mauvaises et aussi impies que celles par lesquelles on cherchait à remplacer le missel, le bréviaire et le rituel. »
« Mais alors que la ferveur religieuse authentique est calme, profonde et pacifique, ceux-ci se tordent, s’agitent et se convulsent. Scandant le nom de Jésus au rythme d’une musique sabbatique, ils s’affaissent haletant d’extase sensuelle. »


L’ÉGLISE

J’arrivais chez saint Pierre et saint Paul et je vis un monde ténébreux plein de détresse, de confusion et de corruption.
Je vis le saint Père dans une grande tribulation et une grande angoisse touchant l’Église.
Je vis l’Église de saint Pierre qu’un petit homme portait sur ses épaules. Il avait quelque chose de juif dans les traits du visage. La chose semblait très dangereuse. Marie se tenait debout sur l’Église du côté du Nord et étendait son manteau pour la protéger.
Le petit homme paraissait succomber. Il paraissait être encore laïc et je le connaissais.
Les douze apôtres que je vois toujours comme de nouveaux apôtres devaient l’aider à porter son fardeau : mais ils venaient un peu trop lentement. Il paraissait au moment de tomber sous le faix, alors enfin, ils arrivèrent tous, se mirent dessous et plusieurs anges leur vinrent en aide. C’était seulement le pavé (les fondations) et la partie postérieure de l’Église (le chœur et l’autel), tout le reste avait été démoli par la secte et par les serviteurs de l’Église eux-mêmes.
Ils portèrent l’Église dans un autre endroit et il me sembla que plusieurs palais tombaient devant eux comme des champs d’épis qu’on moissonne.


Lorsque je vis l’Église de saint Pierre dans son état de ruine et comment tant d’ecclésiastiques travaillaient, eux aussi, à l’œuvre de destruction, sans qu’aucun d’eux voulut le faire ouvertement devant un autre, j’en ressentis une telle affliction que je criais vers Jésus de toutes mes forces, implorant sa miséricorde. Alors je vis devant moi mon époux céleste sous la forme d’un jeune homme et il me parla longtemps. Il dit, entre autres choses, que cette translation de l’Église d’un lieu à un autre signifiait qu’elle paraîtrait en complète décadence, mais qu’elle reposait sur ces porteurs et qu’elle se relèverait avec leur aide.
(...)
Il me fut aussi montré qu’il n’y a presque plus de chrétiens dans l’ancien sens du mot, de même que tous les juifs qui existent encore aujourd’hui sont de purs pharisiens, seulement encore plus endurcis que les anciens : il n’y a que le peuple de Judith en Afrique qui ressemble aux Juifs d’autrefois. Cette vision m’a remplie de tristesse.

L’ORAGE

Je vis un grand orage venir du Nord. Il s’avançait en demi-cercle vers la ville à la haute tour et il s’étendit aussi vers le couchant. Je vis au loin des combats et des raies de sang dans le ciel au-dessus de plusieurs endroits, et je vis approcher des malheurs et des misères infinies pour l’Église.
J’ai vu sur cette ville (Rome) de terribles menaces venant du Nord.
Je vis le sacrifice d’Isaac sur le mont Calvaire. Le derrière de l’autel était tourné au Nord : les patriarches plaçaient toujours ainsi l’autel parce que le mal était venu du Nord.
Ô ville, ô ville (Rome) De quoi es-tu menacée ? L’orage est proche. Prends bien garde ! Mais j’espère que tu resteras inébranlable.
Je vis Rome dans un état si déplorable que la moindre étincelle pouvait mettre le feu partout. Je vis la Sicile sombre, effrayante et quittée par tous ceux qui pouvaient s’enfuir.
Un jour, étant en extase, je m’écriai à haute voix en gémissant : « Je vois l’Église complètement isolée et comme tout à fait délaissée. Il semble que tout le monde s’enfuit. Tout est en lutte autour d’elle. Partout je vois de grandes misères, la haine, la trahison et le ressentiment, le trouble, l’abandon et un aveuglement complet.



On s’était dans l’Église fabriqué un Christ à sa convenance, on l’avait revêtu de ses utopies, en sorte qu’il ne lui restait d’autre grandeur que l’exacerbation de l’orgueil de l’homme. Et l’on voit là, soudain, au plus fort du désastre, que ce Dieu ne peut rien. Car celui-là n’est plus le Christ
Je vois d’un point central et ténébreux (et situé semble-t-il, à Rome même) partir des messagers pour porter quelque chose en plusieurs lieux : cela sort de leur bouche comme une vapeur noire qui tombe sur la poitrine des auditeurs et allume en eux la haine et la rage. »

La courtisane

« La fiancée qui avait près d'elle beaucoup d'hommes et de femmes, était une personne de grande taille, à l'air effronté et avec une parure de courtisane.
Elle avait sur la tête une couronne, sur la poitrine beaucoup de bijoux, trois chaînes et trois agrafes de clinquant auxquelles était suspendue une quantité d'instruments, de figures représentant des écrevisses, des grenouilles, des crapauds, des sauterelles, et aussi de petites cornes, des anneaux, des sifflets, etc. Son vêtement était écarlate ; sur son épaule s'agitait un hibou, lui parlant à l'oreille, tantôt à gauche, tantôt à droite : il semblait être son esprit familier.


Cette femme, avec toute sa suite et de nombreux bagages, entra pompeusement dans la maison de noces et en chassa tous ceux qui s'y trouvaient.
Les vieux messieurs et les ecclésiastiques eurent à peine le temps de ramasser leurs livres et leurs papiers, tous furent obligés de sortir, les uns plein d'horreur, les autres plein de sympathie pour la courtisane.
Quelques uns allèrent à l'Eglise d'autres dans diverses directions, marchant en groupes séparés.
Elle renversa tout ce qui était dans la maison, jusqu'à la table et aux verres qui étaient dessus.
Il n'y eut que la chambre où étaient les habits de la fiancée et la salle que j'avais vu se transformer en une église consacrée à la Mère de Dieu qui restèrent fermées et intactes.

Elle avait avec elle, entre autres, cet hypocrite insigne dont je vis en dernier lieu tous les manèges : il avait tout crédit sur elle. Le savant jeune garçon était son enfant ; il avait grandi et se mettait partout en avant avec beaucoup d'effronterie. 
Chose remarquable, la courtisane, tout son attirail et ses livres fourmillaient de vers luisants, et elle avait l'odeur infecte de ce scarabée brillant qui sent si mauvais.
Les femmes qui l'entouraient étaient des prophétesses magnétiques : elles prophétisaient et la soutenaient.
Il est bon qu'il y ait des gens de cette sorte : ils poussent en avant, puis enfin la chose éclate et la séparation se fait entre le bien et le mal. 



Lorsqu'elle eut tout dévasté dans la maison, elle alla dans le jardin avec sa suite et ils foulèrent beaucoup de choses sous leurs pieds : là où elle passait, tout se desséchait, noircissait, devenait plein de vers et d'infection.
Mais cette ignoble fiancée voulait se marier et, qui plus est, à un jeune prêtre pieux et éclairé.
 Je crois que c'était un des douze que je vois souvent opérer des œuvres importantes sous l'influence de l'Esprit-Saint.
 Il s'était enfui de la maison devant cette femme.
 Elle le fit revenir en lui adressant les paroles les plus flatteuses. Quand il arriva, elle lui montra tout et voulait tout remettre en ses mains.

Il s'arrêta quelques temps: mais comme elle se montrait avec lui pressante et sans retenue, et qu'elle employait tous les moyens imaginables pour le porter à la prendre pour femme, il prit un air très grave et très imposant : il la maudit ainsi que tous ses manèges, comme étant ceux d'une infâme courtisane, et se retira».
«Alors je vis tout ce qui était avec elle s'enfuir, céder la place, mourir et noircir.

Toute la Maison des Noces devenait en un instant sombre et noir, et les vers qui y fourmillaient commencèrent à piquer et à ronger tout.

Et la femme elle-même, rongée entièrement par les vers, tomba par terre et resta étendue sur le sol, conservant sa forme extérieure : mais tout en elle était décomposé et comme de l'amadou.
J'ai aussi écrasé quelques-uns des vers qui gisaient là sans vie et dont l'extérieur reluisait : ils étaient intérieurement desséchés et carbonisés. Mais quand tout fut réduit en poussière et que le silence régna partout, le jeune prêtre revint et avec lui deux autres dont l'un, qui était un homme âgé, semblait envoyé de Rome. »



Il (le vieillard) portait une croix qu’il planta devant la Maison des Noces, devenue toute noire : il tira quelque chose de cette croix, entra dan la maison, ouvrit les portes et les fenêtres, et il sembla que les autres qui étaient devant la maison priaient, consacraient et exorcisaient.
Il s’éleva un orage impétueux qui passa à travers la maison et il en sortit une vapeur noire qui s’en alla au loin vers une grande ville où elle se partagea en nuages de diverses grandeurs. Le tout, hier, hideusement cohérent, se sépara en hérésies distinctes qui trouvèrent refuge dans une ville lointaine.

Quant à la maison, elle fut de nouveau occupée par un nombre choisi parmi les anciens habitants. On y installa aussi quelques-uns de ceux qui étaient venus avec l’impure fiancée et qui s’étaient convertis. Tout fut purifié et commença à prospérer. Le jardin, les peuples, les diocèses aussi redevinrent en leur premier état."


4 commentaires:

  1. Edifiant et riche d'enseignements! Merci pour ce texte.
    Cela reste tout de même très obscur, bien que la doctrine pervertie dont elle parle s'est malheureusement déjà manifestée depuis Vatican II...

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    1. Bonjour Yedakih :-)

      Merci de l'avoir lu... Obscur en effet car malheureusement elle n'avait pas la Connaissance qui aurait tout rendu limpide dans ce qu'elle "recevait".

      Entièrement d'accord pour Vatican II...
      Tu trouveras peut-être la "série" "La Papauté contre l'Islam" intéressante : https://lapieceestjouee.blogspot.com/search?q=La+Papaut%C3%A9
      Il y est beaucoup question de Nostra Aetate...

      Je termine le texte sur Pétrarque que tu as mentionné chez Ror. Je l'ai trouvé enrichissant et fort instructif donc merci à toi pour ce partage. :-)

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  2. Merci, pour avoir mis ce lien sur patreon.
    Ce texte convient à notre époque, j'en reste bouche bée!

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    1. @madi : Merci à toi d'avoir pris la peine de venir le lire.... ;-)
      Je trouve aussi !

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